Empreinte carbone de l’alimentation en France
Dernière mise à jour : 25 avr. 2022

Depuis quelques années, le rôle de notre alimentation dans la transition écologique est mis sur le devant de la scène. Et pour cause : près de 30 % de nos émissions de gaz à effet de serre totaux proviennent de nos assiettes !
La majorité de ces impacts sont générés lors de la phase agricole et une grande partie proviennent de la production de produits d’origine animale destinés à la consommation humaine.
Face à ce constat, un consensus international nous invite à rééquilibrer notre alimentation, et surtout, à la végétaliser. Pour que cette nouvelle culture alimentaire puisse se déployer, il est aujourd’hui essentiel que nous puissions effectuer nos choix alimentaires en ayant conscience de leurs impacts, notamment sur l’environnement.
L’éducation à l’alimentation durable est l’affaire de tou.te.s et s’inscrit dans la transmission de nouveaux repères alimentaires plus sains. L’objectif est non seulement de réduire les impacts sur le climat et la biodiversité mais également sur notre santé. Se nourrir autrement et se tourner vers une alimentation de qualité, nutritionnellement saine, permet de prévenir l’apparition de maladies de civilisation, notamment le diabète et l’obésité, toujours en augmentation en France.
Impact carbone des produits alimentaires courants
Dans une récente étude sur le bilan carbone de l’alimentation, l’ADEME nous montre les flux de matière végétale utilisés pour nourrir les humains présents sur le territoire français.
Sur 300 Mt (millions de tonnes) de végétaux produits chaque année en France, 70 Mt sont exportés et 110 Mt sont destinés à l’alimentation animale. En bout de chaine, 50 Mt sont finalement consommés par les populations (15 Mt de produits animaux, 35 MT de produits végétaux).

Dans cet article, nous partageons certains points essentiels énoncés dans cette étude réalisée par l’ADEME. Nous avons fait le choix d’expliquer ces impacts poste par poste (production, transformation, transport…etc.).
Production agricole : où se situent les impacts ?
La production agricole est le premier poste d’émissions de GES (gaz à effet de serre), pour un total de 109 Mt d’eqCO2, soit les deux tiers de l’empreinte carbone totale de l’alimentation.
La majorité des impacts de l’alimentation se situent au niveau de l’amont agricole. Il convient donc, pour accompagner la transition écologique, de revoir la composition des assiettes, et ce, dès la phase d’approvisionnement.
Le retour à une alimentation plus végétale et moins transformée accompagne la réduction des impacts sur l’environnement et notamment des émissions de gaz à effet de serre. Et ceci sans compter, bien évidemment, les effets positifs qu’ils ont sur la santé (voir ces études sur le sujet : Enjeux sanitaires et environnementaux de la viande rouge, et l’étude Oxford Vegetarian Study).

La lecture de cette étude nous révèle d’autres éléments importants :
La consommation de viande et de lait mobilise à elle seule plus de 80 % de la surface agricole française.
La moitié de la consommation d’énergie de l’agriculture est de l’énergie indirecte (liée aux intrants et aux équipements).
Avec les émissions de méthane dues aux fermentations entériques du bétail et les émissions de protoxyde d’azote liées aux cultures destinées aux animaux, la viande et les produits laitiers totalisent 85 % de l’empreinte GES de notre alimentation au stade agricole.
Transformation : où se situent les impacts ?
L’essentiel de la consommation alimentaire provient des industries de transformation.

Après l’agriculture et l’élevage, le second secteur le plus impactant en matière d’alimentation est celui de la transformation. Les produits dont la consommation d’énergie et les émissions sont les plus élevées sont les pommes de terre transformées, les boissons alcooliques distillées, les plats préparés, le sucre, la fabrication de cacao, de chocolat, les produits de la confiserie, le thé et le café, le beurre et le fromage.
Le transport : où se situent les impacts ?
Le secteur des transports se retrouve en deuxième place des émissions de gaz à effet de serre totaux mais ne représente seulement 5 % des impacts de l’alimentation, presque autant que les emballages.
Chercher à rapprocher les lieux de production des lieux de consommation reste néanmoins un enjeu majeur, y compris pour les produits transformés.
Le transport des aliments pour animaux, souvent importés, est d’ailleurs à l’origine de 30 % du trafic total (en majorité des tourteaux de soja) et de 19 % des émissions liées au transport.
Les fruits et légumes représentent quant à eux ¼ du trafic total et 31 % des émissions. Soit la catégorie de produits se plaçant en tête des émissions liées au transport : consommer les fruits et légumes locaux a donc un grand impact sur notre empreinte carbone alimentaire.
Pour le transport, l’étude affirme que les produits laitiers génèrent une empreinte carbone plus importante que celle de la viande, en effet nous consommons en quantité journalière deux fois plus de lait et de produits laitiers (237g/jour) que de viande (107g/jour) et d’œufs (13g/jour) et par conséquent, les émissions liées au transport de lait et de produits laitiers sont estimées à 1,8 MtCO2 contre 1,2 MtCO2 pour celles de la viande et des œufs.
Consommation : où se situent les impacts ?
Fruits et légumes

La part importée des produits exotiques et hors-saison peut atteindre 40 à 50 % pour les légumes (en particulier les tomates, les concombres et les courgettes).
Le pic d’importations se situe en décembre avec l’achat de 300 Kt de fruits frais. Il convient donc de redoubler de vigilance lors de l’élaboration des repas en hiver, et de privilégier les produits de saison ou en bocaux.

Viande

L’étude révèle de grandes disparités de consommation : 26 g/j pour les 10 % plus petits mangeurs contre 234 g/j pour les 10 % plus gros mangeurs de viande. De nombreuses raisons peuvent expliquer ce phénomène sur un sujet qui, encore aujourd’hui, divise les populations. Pourtant, les chiffres concernant les impacts de la production de viande sont clairs : les 3/4 des émissions de l'alimentation proviennent des produits d'origine animale, et en particulier de la viande rouge.
Selon le Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, une étude réalisée en 2019 en France a montré une baisse de consommation de la viande de 0,8 %. Les achats de viande par les ménages pour leur consommation à domicile diminuent pour la cinquième année consécutive, après avoir connus une fulgurante augmentation depuis les années 50.
Les impacts à l’échelle d’un repas
Un repas hors domicile émet près de deux fois plus d’émissions qu’un repas à domicile.
Les impacts CO2 d’un établissement de restauration proviennent pour 70 à 90 % de l’assiette. Environ 20 % seulement sont générés par le fonctionnement des cuisines (cuisson, lumières, froid).

Les cartes des établissements de restauration reposent encore sur l’idée qu’un repas plaisir est un repas consistant, carné et nutritionnellement riche.
Fort heureusement, des restaurateurs engagés, conscients des enjeux en matière d’alimentation, introduisent des alternatives plus saines et réduisent les portions !
Comment réduire la quantité de viande consommée ? L'exemple de la cantine de Chartes
A Chartres, le directeur de la restauration collective s’est chargé de l’introduction du menu végétarien. Il explique qu’un repas végétarien ne se compose pas obligatoirement de « substituts », il s’agit seulement d’un repas sans viande ni poisson, pouvant parfois contenir des œufs et des produits laitiers.
Au sein des cantines Chartraines, les équipes de cuisine innovent et testent de nouvelles combinaisons d’aliments, et les menus sont ensuite vérifié et validé par une responsable diététique, qui fait également des propositions de repas végétariens équilibrés.
Quant à l’acceptation à l’arrivé du menu végétarien les avis ont été très divers : 9 élèves sur 45 ont aimé le repas dans sa globalité. L'introduction de nouveaux repas bouleverse nos repères. Pour assurer sa réussite, elle doit s'accompagner d'une éducation à l'alimentation et au goût.

Quelles orientations en matière de carbone et d’alimentation en France ?
Le système alimentaire est façonné par des politiques publiques de différentes natures tant à l’échelle nationale (Programme National Nutrition Santé, Politique Agricole Commune, Stratégie Nationale Bas Carbone, etc.) que territoriale (Plan Alimentaire Territorial, Schéma Régional Biomasse, etc.).
Pour autant, il n’existe pas de feuille de route précise permettant d’accompagner la révision de nos repas, si ce n’est l’introduction d’un repas végétarien hebdomadaire en cantine scolaire. Si ce sujet fait encore débat, il a le mérite d’inviter chaque parent à la réflexion et d’accompagner l’augmentation de la consommation de protéines végétales recommandée par le nouveau Plan National Nutrition Santé.
L’urgence d’une consommation alimentaire bas carbone
De nombreuses expert.e.s indépendant.e.s se sont regroupé.e.s pour analyser notre alimentation et identifier les orientations alimentaires à prendre afin que les humains puissent se nourrir de façon équilibrée et durable.
Parmi les études les plus (re)connues, notons celles de la commission Eat Lancet ainsi que le scénario Afteress.
Enfin, une simulation faite dans le cadre du projet CECAM* montre qu’un régime réduisant d’environ la moitié la consommation de viande et de produits laitiers au profit d’une augmentation de la consommation d’aliments végétaux, associée à une évolution des pratiques agricoles plus économes en intrants et à une réallocation des terres agricoles, permettrait de réduire l’empreinte carbone du stade agricole par deux.
Sources :
https://www.chartres.fr/no-cache/detail/actualites/le-veggie-sinvite-dans-les-cantines-scolaires/